TRANCRAINVILLE (28) 23.01.1982

Résumé
Observations d'un phénomène lumineux mobile éclairant de large zones de paysage sur une distance importante : phénomène inexpliqué.
Description
Le GEIPAN continue à publier l'ensemble de ses archives sur son site public www.geipan.fr. Dans ses publications, figurent des cas anciens classés à l'époque (A, B, C ou D) et qui font aujourd'hui l'objet d'un réexamen, dans le seul but d'être plus pertinent dans les conclusions. Grâce à de nouveaux moyens techniques (logiciels) et à l'expérience d'enquête acquise depuis toutes ces dernières années, ce réexamen aboutit quelquefois à de nouvelles remarques voire à un changement de classification.
Ce cas d'observation précédemment classé D et nommé ORLEANS (45) 1982 fait partie d'un ensemble de cas réexaminés récemment.
Le 23 janvier 1982 entre 4h35 et 4h55 des gendarmes du peloton autoroutier en patrouille sur l'A10 (sens Paris-Province) aperçoivent dans le ciel une masse claire indéfinie ainsi qu'une zone fortement éclairée sur le sol. Tout au long de leur trajet d'une trentaine de kilomètres leurs observations se poursuivent soit en roulant soit à l'arrêt. Aucun bruit particulier n'est entendu notamment durant l'arrêt de la patrouille. Plusieurs fois ils perdent de vue le phénomène avant de le revoir. En toute fin d'observation la masse claire n'est plus aperçue mais les témoins constatent que la lueur subsiste à l'Est sur des bosquets bordant l'autoroute. Une enquête sur place a été réalisée par les gendarmes qui ont contacté la BA123 d’Orléans située à 7 km à vol d'oiseau de l'autoroute : aucun avion ou hélicoptère n'était en vol et la station radar de la base était à l'arrêt depuis la veille au soir. La société Cofiroute gestionnaire de l’A10 a été contactée : aucun employé de cette société n'a remarqué le phénomène. Aucun autre témoignage d'habitant situé le long de l’A10 n'a été recueilli. Une habitante d'Ingré (45), témoin d'un phénomène le 17 janvier 1982, fera une déclaration à la presse locale le 19 janvier 1982 soit quelques jours avant l'observation des deux gendarmes mais ne se présentera jamais au service de police dont elle dépend. La presse locale commentera l'évènement dans un article le 27 janvier 1982 en rapprochant les trois témoignages.
Nous avons exploré deux hypothèses pouvant expliquer certaines caractéristiques physiques ou dynamiques du PAN (voir le compte-rendu d'enquête).
Il est établi que le phénomène était en mouvement, et non pas statique, puisqu'il éclairait diverses parties du paysage relativement proche (pylônes, hangars…) sur une distance importante.
On sait que les astres (ici les planètes Jupiter, Saturne ou Mars étaient présentes) peuvent créer des perceptions de phénomènes lumineux suivant le témoin dès lors que ce dernier est lui-même en déplacement. Mais on ne voit pas comment l’un de ces astres serait perçu comme une « masse claire » même au travers d'un nuage, et produirait des éclairages au sol aussi focalisés.
L’hypothèse de la confusion avec un hélicoptère équipé d’un puissant projecteur, se trouvant dans ou au-dessus de la couche nuageuse est plus intéressante. Elle permettrait d’expliquer la perception unique d’une « masse claire », sans contour bien défini et l’absence de perception des feux de navigation ; ainsi que le phénomène lumineux observé au sol et éclairant diverses parties du paysage, tout comme le ferait un projecteur d’hélicoptère balayant la zone tout au long de son déplacement en longeant l’autoroute. Les projecteurs ne visant a priori pas une traversée des nuages, il faut supposer que la mission de recherche au sol avec projecteur se fait prioritairement au travers des trouées de nuages, ce qui n’est pas incompatible de la présence d’un obstacle nuage entre les témoins et l’hélicoptère, car la couverture nuageuse basse n’était pas continue (3/8 octas).
L’absence de bruit perçu et de faisceau visible ne sont pas des arguments déterminants. Selon les conditions météorologiques (force et direction du vent, pureté de l’air…) le bruit peut très bien ne pas être perçu d’une part, et un faisceau lumineux ne pas se former si l’air est pur, d’autre part.
La couche nuageuse relativement uniforme (3/8 et 6/8 octas sur deux niveaux) se situait (sauf erreur météo) à des altitudes (1200 et 1500 m) plaçant l’hélicoptère à une distance du sol trop forte pour la portée des projecteurs tels que ceux équipant les hélicoptères civils et militaires que l’époque. De plus, la portion plutôt petite du pylône éclairé montre que l’objet l’éclairant, si situé à la hauteur des nuages, devait produire un faisceau de manière très focalisée, un peu comme le ferait un laser, ce qui n’était pas non plus dans les capacités embarquées à l’époque.
La description, en particulier par T1, de l’éclairage du paysage par le phénomène rappelant celui produit par la « lumière noire » ne correspond pas à l’hypothèse. Une lumière utilisée dans le cadre par exemple de recherches, doit au contraire être vive, puissante, et bien éclairer tout le paysage environnant.
Enfin, pourquoi l’hélicoptère volerait au-dessus des nuages pour une fonction de surveillance avec projecteur (au travers de trouées nuageuses) ? L’hypothèse d’un retour de mission en ayant laissé le projecteur allumé se heurte par ailleurs au fait T1 a eu le temps de voir les détails du pylône et a perçu une immobilité des lueurs.
La probabilité d’une telle hypothèse est trop faible pour être retenue. Par ailleurs la consistance apparait suffisante pour soutenir un caractère inexpliqué en l’état.
Dans la méthodologie actuelle GEIPAN, le présent niveau d’étrangeté et de consistance imposent de pratiquer une « enquête terrain » avec le témoin pour une reconstitution et un entretien cognitif. Cette dernière est susceptible d’impacter positivement et négativement l’évaluation d’étrangeté comme de la consistance. Mais elle n’est pas possible pour un cas en revisite si longtemps après. Aussi l’évaluation du présent cas est faite selon les critères actuels de prise en compte de l’étrangeté et de la consistance* comme si l’enquête terrain avait été faite et avait été totalement neutre (aucun apport en plus ou moins), ce qui est quelque fois le cas.
Par contre, afin de marquer cet écart méthodologique, la classification se fait sur la base ABCD et non sur l’actuelle ABC D1/D2 qui correspond pour le classement inexpliqué à une validation plus forte du caractère inexpliqué.
Ici le cas est la limite entre un cas inexpliqué et un cas inexploitable par manque de consistance dans l’état de dossier faute d’enquête GEIPAN menée sur place.
En conséquence, le cas est classé D : inexpliqué.
*(voir La méthodologie de classification au GEIPAN).